Tout le monde connaît les récits de princes et de princesses, de cœurs faits pour fusionner éternellement en un doux nuage et autres ravissants tableaux. Mais ils égrènent plus rarement l’anthologie des lapins que les princesses avaient à déposer de toutes parts, ou celle des princes se transformant en chandelier.

Pour ma part, je dispose d’une collection de râteaux me permettant d’ouvrir ai­sément un magasin de jardinage – malgré un important déficit en pelles. En effet, lors de mes tête-à-tête, mes bégaiements n’ont d’égal que l’inintérêt de mes propos. Afin de corriger ces démarches, je me suis décidé à rechercher des améliorations.

Un ami m’a dit : « Lis des livres, des romances ! » Et effectivement, maintenant, je sais parfaitement comment séduire en étant marquis, millionnaire, et même vam­pire ! Manque de chance, je rencontre rarement ces situations dans ma vie de tous les jours. D’autres décrivaient les tactiques pour briser les défenses adverses afin de conquérir les lauriers des cœurs ! Peu convaincu à l’idée de me pointer à une rencontre muni d’une MG42 et d’une armure de plaque, je choisis de me tourner vers des moyens plus paisibles.

J’ai toutefois tenté la mise en pratique de conseils amicaux, mais leur combinai­son était complexe : être aimable mais provoquer, montrer son écoute et sa fiabilité mais ne pas être trop disponible et faire le détaché. En plus de compter le nombre de mains dans les cheveux, observer les pupilles, les lèvres, chaque micro mouvement ou moindre mot… J’étais si concentré sur tout cela que je ne pensais à rien d’autre, ce qui devait me faire passer pour une sorte de psychopathe.

Persuadé qu’il fallait adoucir un peu la mise en application de ces procédés, un autre ami m’a dit : « Tu te prends trop la tête ! Sois naturel ! » C’est bien ça comme conseil, si on ne veut pas se fatiguer : être naturel. Sauf que si on a besoin qu’on nous le dise, c’est que cela ne nous vient pas naturellement… ? Ceci complique le principe. Dans le doute, s’il ne fallait pas trop réfléchir, je me suis mis sous perfusion de tord-boyaux. Mais, si ma réflexion fut effectivement réduite, ma capacité à articuler égale­ment.

Je me suis alors risqué dans les méandres d’internet jusqu’à des antres mysté­rieuses : les sites consacrés à la drague. J’y ai découvert les secrets de la séduction dans la file d’attente des toilettes ou en sniper avec l’approche du « combien coûte ton cul ? ». Bien qu’impressionné par l’originalité de ces procédures, je décidai de me dé­tourner de ces dernières…

Mais je devrais sans doute moins ressasser tout cela, parce que depuis tout à l’heure, la charmante jeune femme en face de moi n’arrête pas de parler… Mais je ne sais absolument pas de quoi. Je crois que j’ai saisi l’idée de ne pas trop se prendre la tête… La prochaine fois, j’essayerai quelque chose de moins formalisé. Quoique, elle se rapproche de plus en plus… Mais qu’ai-je fais pour cela ?